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L’ère du feu : le pyrocène

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L’éditorial de Patrick Le Hayric, le 21 juillet 2022. On appelle cela des « mégafeux ». 650 ha brûlés dans Les Cévennes. Plus de 20 000 ha parti en fumée en Gironde et des milliers de personnes évacuées. 130 ha dans le massif de la Montagnette dans les Bouches-du-Rhône. Le feu s’attaque au centre Bretagne. On pourrait encore en ajouter. L’assèchement de la végétation, sous le soleil brûlant, facilite les départs puis le développement de ces feux. Il a même été constaté des départs d’incendies dans des champs de blé en cours de récolte. À chaque fois des centaines de pompiers sont mobilisés. On ne saluera jamais assez leur courage et leur engagement au service de l’intérêt public. Ils sont exemplaires. Il faudrait leur donner des moyens supplémentaires. Au début des incendies en Gironde, une partie de la flotte vieillissante des Canadairs était clouée au sol pour des travaux de maintenance. La France n’en dispose que de douze. Il en faudrait environ vingt-cinq. Avec le prix d’un avion de guerre Rafale on pourrait en acheter neuf. C’est une question de choix.

Ce sont tous les pays de l’Union Européenne qui devraient plus et mieux s’équiper en Canadairs et en hélicoptères. N’y a-t-il pas d’ailleurs un projet utile de coopération pour un système européen de sécurité civile à déployer avec des partages de coûts et de matériels. Voilà qui serait plus efficace que les projets d’armée européenne. Encore une fois c’est une question de choix !

Quand les feux adoptent des comportements hors de contrôle et que les riverains qui en sont victimes n’en avaient pas vécu de tels, on utilise le terme « mégafeux » pour les qualifier.

Selon la base de données sur les incendies de forêts, il n’a été recensé ces douze dernières années qu’une vingtaine de feux dépassant les  1000 ha. Or, un rapport sénatorial estime que d’ici une quinzaine d’années 7 millions d’hectares vont être sensibles au feu. Cela représente presque la moitié des surfaces actuellement boisées. De son côté, Météo-France estime avec inquiétude que la région Centre-Val de Loire sera tout autant exposée aux feux en 2040 que le Gard aujourd’hui. Dans son rapport du mois de février dernier, le programme des Nations Unis pour l’environnement prévoit une augmentation mondiale des feux extrême de 50% d’ici 2050. Les bouleversements climatiques sont à l’origine de ces mégafeux dévastant des forêts dans toute l’Europe et sur tous les continents : l’Italie, le Portugal, la Grèce, la Tunisie, la Californie, le Canada, la Sibérie, le Brésil… Certains scientifiques appellent cette nouvelle ère : le pyrocène. L’ère du feu.

La combinaison du réchauffement climatique et du recul de la culture et de l’élevage aggrave sans cesse les risques. Il faut y ajouter les sérieux problèmes de santé que cela génère. L’un des enjeux immédiats est d’obliger les propriétaires de forêts à les entretenir, à coopérer avec des éleveurs pour permettre aux animaux d’y venir pour brouter les herbes et débroussailler. S’agissant des forêts domaniales, il convient de cesser de réduire les moyens de l’office national des forêts dont le travail des agents est admirable.

Protéger nos forêts, la nature et la santé appelle de sortir des actuelles politiques malthusiennes : la politique agricole commune et les choix gouvernementaux favorisent la concentration agraire et délaisse des parties entières des anciens territoires agricoles laissé à l’abandon avec les choix de la jachère financée, la plantation subventionnées d’arbres en lieu et place de fermes à taille humaine en élevage, en culture, en vignoble ou en oliveraie qui protègent les écosystèmes et les territoires.

Les coupures de végétation dense, les espaces « tampons » entre les bâtiments et la végétation et la défense de la vie rurale sont les meilleurs pare- feux. La restauration des écosystèmes constitue un important moyen d’atténuation des risques d’incendies. Mais en définitive, il n’y a pas de solutions pérennes sans s’attaquer aux bouleversements climatiques qui étouffent les villes et assèchent les campagnes. Les travailleurs paysans en sont les premières victimes. Avec eux et tous les salariés et les chercheurs il conviendrait d’élaborer un grand plan pour la justice sociale et environnementale. Celui-ci devrait comprendre un plan de moyen terme de transformation de la production agricole et des forêts, incluant une conséquente aide à la formation et l’installation de jeunes paysans. Immédiatement nous devons soutenir nos pompiers, les collectivités locales et tous les services de l’État, et leur donner les moyens de faire face.

Photo SDIS 33.

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